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Il faut qu'on parle de Kevin / Lionel Shriver
Livre
Edité par Belfond. Paris - 2006
Aux Etats-Unis, de nos jours. A la veille de ses 16 ans, Kevin Khatchadourian exécute neuf personnes dans son collège. A travers des lettres au père dont elle est séparée, sa mère retrace l'itinéraire meurtrier de leur fils.
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Avis des lecteurs
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Il faut qu'on parle de Kevin
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par Céleste Le 04 juillet 2020 à 09:57 -
La maternité selon Shriver
Lionel Shriver brise ici un tabou en se penchant sur cet amour maternel qu’on tient habituellement pour inné à travers le désarroi d’une mère confrontée à un enfant qu’elle pressent foncièrement malfaisant dès sa naissance. Mais peut-on haïr la chair de sa chair ? La narratrice, Eva, écrit à son mari dont elle est séparée pour lui faire part de ses états d’âme et de ses réflexions depuis que leur fils de 16 ans a commis l'indicible… Le choix de la correspondance à sens unique donne une dimension excessivement intime à ses propos et accentue l’horreur de ses révélations. Eva avoue qu'elle ne voulait pas d'enfants, décrit le vide émotionnel qu'elle a ressenti à la naissance de son fils, les faux câlins qu'elle s'est forcée à prodiguer, alors que son mari se pâmait d'adoration pour le bébé. Si les médecins avaient trouvé à Kevin une tare ou un syndrome, peut-être aurait-elle éprouvé un soupçon de compassion... Le temps passant, c’est pourtant le père qui semble le moins en phase avec son enfant : aveuglé par le modèle stéréotypé de la famille américaine parfaite, il ne veut – ne peut ? – à aucun moment admettre que son fils puisse sortir du cadre bourgeois prédéfini. Mais c’est bien la question de l’absence d’amour maternel qui est au cœur du livre : l'auteure, qui refuse toute sensiblerie, ne nous dit pas lequel, de la mère ou du fils, plaindre ou craindre. Le personnage d’Eva bouleversera certains par sa franchise alors qu'elle en révulsera d'autres par sa froideur. Alors même qu’elle développe une perception très extrême d’une maternité aux conséquences implacables, Shriver parvient à faire de ce roman terrible, aussi glaçant que passionnant, une totale réussite.
par Céline L. - La Médiathèque Le 23 août 2019 à 14:52